VERS TOI TERRE PROMISE de Jean-Claude Grumberg
"VERS TOI TERRE PROMISE
Tragédie dentaire"
de Jean-Claude Grumberg
C’est ça,c’est ça, l’hébreu…
Va falloir qu’ils m’apprennent d’urgence à gémir en hébreu!
Que reste-t-il quand il n’y a plus rien ?
Quand on perd une dent soit elle repousse, soit on la remplace.
Mais on ne remplace pas un être cher lorsqu’il a disparu.
On ne remplace pas un pays par un autre quand on n’a plus de patrie.
Dans Vers toi terre promise, Jean-Claude Grumberg s’interroge
sur ce que cela signifie d’être dépossédé de tout ce qui constituait une vie.
En 1942, Charles Spodek victime des lois anti-juives
doit abandonner son cabinet de dentiste.
Il le récupérera en 1945.
Mais entre temps une de ses filles a disparu en déportation
tandis que l’autre, placée pendant la guerre dans un couvent,
a choisi de rentrer dans les ordres.
Charles et Clara, son épouse, ne la reverront plus.
Pour eux qui sont athées, la nouvelle est un choc.
Progressivement s’insinue en eux le sentiment de ne plus avoir de pays.
Et aussi, sans grande conviction, le besoin de partir ailleurs.
En Israël? Pourquoi pas.
Une pièce magnifique, d'une humanité bouleversante,
qui laisse le spectateur épuisé mais ravi, après une heure trente
passée sans cesse en équilibre, entre rire et coeur serré.
Jean-Claude Grumberg explique qu'un élève, un jour, lui a demandé :
"Comment pouviez-vous vivre après la Shoah ?".
C'est un peu sa réponse.
Il y a la douleur indicible, le silence, le chagrin qui rend fou,
la religion, le rite, la foi, l'espérance.
Et les cantiques, et les chansons yiddish.
Et l'humour.
Tout est remarquable dans ce spectacle,
le quatuor de comédiens, le décor et la mise en scène,
et puis surtout l'écriture, brillante, féroce,
qui traque la xénophobie, l'intolérance et l'indifférence.
Du grand théâtre.